Beau travail !

Beau travail ! Réinventer 3 juillet 2023 #Réinventer #Travail #SENS #pertinence #résonance Pour cette troisième carte stratégique estivale, nous nous demandons comment redonner du sens au travail et c’est l’opportunité de parler de deux livres récents et de découvrir la boussole stratégique de Wonderloop©  Le programme en trois étapes : 1/ Le Beau ou l’intelligence sensible pour sauver le sens dans les organisations ? 2/Les trois critères de Coutrot et Perez où le Beau est intégré dans l’Utile et l’Ethique 3/Les 4 métavaleurs de Wonderloop© pour réinventer le travail  en Beau, Bon, Juste et Utile 1/ Le Beau, ou l’intelligence sensible, pour sauver le sens dans les organisations ? Beau travail c’est peut-être ce que votre manager vous dira avant de partir en vacances pour vous signifier sa reconnaissance du travail bien fait. Ce « jugement de beauté » comme l’appelle le psychanalyste Christophe Dejours, spécialisé dans la psychodynamique du travail, nourrit la fierté du travail bien fait et la reconnaissance de la qualité de travail : « Le jugement de beauté porte sur la conformité du travail accompli avec les règles de l’art et les règles de métier. Il ne peut être proféré que par des gens qui connaissent le métier comme celui-là dont le travail est soumis à l’épreuve de jugement : le jugement de beauté est porté par les pairs et il s’énonce dans le lexique de la beauté : beau travail, jolie façon, bel ouvrage, démonstration élégante, etc. Le jugement des pairs est à la fois le plus précis, le plus subtil, le plus sévère et le plus précieux. Au-delà de l’épreuve de beauté référant à la conformité, il y a un deuxième volet du jugement qui peut parfois être formulé, mais il suppose que préalablement le travail à évaluer ait bénéficié d’un jugement de conformité satisfaisant. Ce deuxième volet du jugement porte sur le  « style » du travail qui confère à son auteur l’originalité par rapport à ses collègues. Christophe Dejours : « La psychodynamique du travail face à l’évaluation : de la critique à la proposition – 2011 » Ce jugement d’appréciation constitue un facteur essentiel du sens au travail car il a un impact majeur sur l’identité, continue Dejours :« En effet, lorsqu’un travailleur bénéficie du jugement de beauté proféré par les pairs, il devient, de droit ou de fait, membre d’une communauté d’appartenance, d’une équipe, d’un collectif de travail, voire d’un métier. C’est un « vrai » artisan-menuisier, c’est un « vrai » pilote de chasse, c’est un « vrai » chercheur reconnu par la communauté des chercheurs, c’est un « vrai » vigneron reconnu par les autres vignerons et, lorsqu’il bénéficie, de surcroît, du jugement d’originalité, il obtient la reconnaissance d’une distinction par rapport aux autres, donnée précisément par les autres. » Le Beau serait gage de vrai, vraie expertise, vrai savoir-faire, vrai travailleur. Ce lien « englobant » du Beau s’inspire directement de la définition donnée par Platon dans la longue histoire de l’éthique des vertus : « le beau est associé au vrai et au bien comme une des idées les plus élevées ».  Ce regard « englobant » de l’esthétique sur les organisations et leur fonctionnement n’est pas nouveau d’Antonio Strati, en passant par Steven de Groot ou des philosophes comme Simone Weil ; le sujet alimente toujours de nombreuses recherches. Même Maslow (évoqué la semaine passée) l’avait envisagé dans sa théorie des besoins mais cette dimension a été un peu oubliée avec le temps comme le rappelle la revue Gestion. L’article reprend en effet certaines recherches de la psychothérapeute Hazel Skelsey publiées en 2014 dans British Psychological Society « Maslow’s Hierarchy of Needs – the sixth level » :« Au-delà des besoins physiologiques, de sécurité, d’appartenance, d’estime et de réalisation de soi, Maslow aborde deux autres catégories de besoins. D’abord le désir d’apprendre et de comprendre, qui se caractérise par un besoin de liberté d’enquête et d’expression. Un peu plus tard, il ajoutera le désir esthétique, par la recherche de beauté, de créativité, d’harmonie, etc. Il est remarquable que dès le milieu du XXe Maslow ait identifié ces besoins dans le milieu du travail[…] Ces deux étages sont d’utilité publique ! Ils vont vous permettre de justifier l’importance de l’apprentissage, ou de la qualité du cadre de travail pour des usagers… qu’ils soient des employés ou des clients. » Qu’on l’aborde sous le prisme de l’esthétique, de l’harmonie, comme source d’inspiration ou de stimulant, le Beau dans le travail est un facteur-clé pour trouver du sens en renforçant notre satisfaction personnelle et notre sentiment d’accomplissement, alors pourquoi le Beau est-il absent de la grande majorité des réflexions stratégiques ? C’est la croisade de Jean-Philippe Bouilloud qu’il détaille dans son  dernier livre Pouvoir faire un beau travail. Une revendication professionnelle, Erès – mars 2023. L’auteur invite les entreprises à se saisir du sujet de la beauté : « La préoccupation esthétique doit aussi être un impératif éthique (ce que Paul Audi appelle également « esth’éthique »), une catégorie morale pleinement reconnue, car elle concerne chacun dans l’univers du travail. »  Le Beau est pour Jean-Philippe Bouilloud « un droit moral » et l’auteur s’emploie à comprendre comment les catégories de l’esthétique se déploient dans notre rapport à nos activités, comment s’établissent nos conceptions esthétiques du travail ou des « jugements de beauté ». Pour mieux comprendre l’impact du Beau sur le sens, Bouilloud nous fait passer de l’autre côté du miroir pour regarder son incarnation : le geste ou le beau geste au cœur de notre pratique professionnelle. Il met ainsi l’emphase sur le monde de l’artisan, lieu par excellence du Beau geste. Son analyse rentre pleinement en résonance avec ce que Matthew B. Crawford dans « Éloge du carburateur : Essai sur le sens et la valeur du travail (2016) » avait déjà exploré en soulignant l’importance du geste comme épanouissement personnel et compréhension du monde. « Un ébéniste qui caresse une pièce de bois pour en apprécier le fini et la régularité du grain ; une infirmière qui regarde avec contentement le plateau où elle a disposé dans l’ordre les instruments qui seront nécessaires au chirurgien ; un maçon de campagne qui cherche à «

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